vendredi 8 avril 2011

DEUX GENTILS D'ALSACE EPATANTS



Mon boulot, et mon plaisir aussi, vous le savez bien, c'est de me mettre en quatre pour vous dénicher des merveilles sans vous ruiner. Le printemps est là, le temps est venu de se désaltérer en douceur, de faire venir les fleurs à soi, et l'Alsace, on l'aime aussi pour ça. Allez, je vous balance sans tarder mes deux délices d'initiés du jour.


Championne pour ses blancs, l'Alsace met en avant ces cépages sur les étiquettes, dont les noms peuvent accolés à celui du village, du lieu-dit ou du grand cru. Le principe a ses exceptions : deux types de vins d'entrée de gamme que les vignerons commercialisent sous le nom de gentil ou d'edelzwicker (que les choses soient claires : ce ne sont pas des cépages, contrairement à ce que beaucoup pensent). Edel et Gentil sont en réalité des assemblages (le cahier des charges de production impose un minimum de 50% de cépages nobles : riesling, gewürztraminer, pinot gris ou muscat) pour mitonner au final des vins frais, légers, de consommation rapide, à boire à la régalade, vendus très peu chers. C'est exact, les vignerons, négociants ou caves coopératives peu consciencieuses y mettent dedans les rebus de la récolte de l'année, et l'image de l'édel et du gentil n'est pas franchement fameuse auprès des puristes et des amateurs qui ne jurent que par les grands crus.

Mais qu'est ce que ça vaut, au fond, un Edel ou un Gentil ? Vous me connaissez, j'ai voulu regoûter (à l'aveugle intégral, comme d'hab') tous les Gentil et les Edelzwicker des deux derniers millésimes. Je viens malheureusement d'en déguster toute une série dont la valeur est encore bien au-dessous de leur image déplorable, c'est dire!

Mais j'ai aussi aussi mis la main sur deux bouteilles splendides, vendues respectivement 8 et 5,60 euros. Aromatiquement et gustativement très différentes l'une de l'autre, et pourtant, elles proviennent, c'est rigolo, du même village du Haut-Rhin: Katzenthal.

La première (bouteille de gauche) vient du Domaine Meyer-Fonné, donne un vin assez sec, très riesling, fumé, franc, direct. Pour 5,60 euros, il y a indiscutablement beaucoup de vin dans le flacon. Une sacrée surprise gourmande chez un vigneron que j'ai régulièrement primé pour ses grands crus. Mais je vais vous donner un tuyau de pro : on reconnait les grands vignerons au soin qu'ils amènent à TOUS leurs vins, sans exception, même les plus simples, même ceux qu'ils proposent à 5,60 euros.

La seconde fusée made in Alsace, et là, pour moi, c'est une découverte, c'est le "Gentil de Katz" du Domaine Clément Klur. J'ai curieusement reçu le 2008 alors que le 2010 est actuellement en vente. Mais cette erreur tombe très bien pour le vigneron car pléthore de 2008 sont de vrais viellards alors que le vin du chat (katz en alsacien et allemand) est en pleine forme; de beaux arômes de litchi et de fleurs explosent au nez (a lot of gewürztraminer inside); en bouche, même présence, même plénitude, du beau gras qui vient tapisser le palais, sans lourdeur, on est face à un vrai beau vin expressif et langoureux...Le rêve sur un bon munster au lait cru ou tout autre fromage au lait cru à pâte pressée cuite. A 8 euros, qui dit mieux?